Le petit-déjeuner est devenu pour moi un moment familier chez Dimitry. Et nous ne manquons pas à ce rituel aujourd'hui, malgré le réveil matinal. Nous partons à 8h passées de quelques minutes, en direction de la gare. Bloqué.e.s dans les bouchons d'Irkoutsk, les minutes passent et l'heure de mon train approche. Nous décidons de garer la voiture et de terminer à pied, en courant. Hors d'haleine, nous arrivons sur le quai et je saute dans le train n°70 qui partira à peine une minute après. Ouf !


Dans la précipitation, je suis montée dans le premier wagon trouvé sur le quai, qui s'avère ne pas être le mien. Je traverse donc quelques wagons pour arriver au n°13, dans lequel je trouve peu de voyageurs. Je m'installe à la couchette n°13. La provodnitsa m'apporte des draps de lit, mais je ne les utiliserai pas cette fois. J'ai choisi de voyager de jour pour cette portion du Transsibérien, il parait que c'est la plus belle de la ligne !

Je m'installe donc et place mes écouteurs sur mes oreilles. Je choisis des morceaux bien précis pour accompagner les paysages qui vont défiler sous mes yeux. J'ai le nez collé à la fenêtre et j'attends le Baïkal.

Je repasse à l'endroit où nous nous étions garés pour débuter la marche jusqu'au Circumbaïkal. Les virages observés par les rails pour traverser ce relief bordant le lac me laissent contemplative. Je sais que derrière, s'étend la plus grande réserve d'eau douce de la planète et je suis pleine d'admiration lorsqu'enfin je vois les eaux de l'immense Baïkal. On le longe quelques temps, jusqu'à la ville de Slioudanka, la plus au sud du lac.



C'est en grignotant des graines de tournesol, comme une бабушка (baboushka) que je dis doucement au revoir au дедушка Байкал (diédoushka Baïkal, grand-père Baïkal). Lui qui m'a apporté tant de sérénité et de satisfactions ces dernières semaines, ce dont j'avais besoin après presque 3 mois de voyage.


Il est midi passé et je commence à avoir faim. Comme tout.e bon.ne passagèr.e de train longue distance en Russie, je me prépare des nouilles instantanées.

Alors que je m'apprête à manger, voilà que le lac réapparait à la fenêtre !



Il ne cessera de me faire la surprise de réapparaître alors que quelques instants plus tôt, je croyais le quitter pour de bon.

Je savoure cette vue, oubliant même de tourner la tête pour voir à travers la fenêtre opposée les monts Хамар Дабан (Khamar Daban), dont le seul nom me fait déjà voyager.

Le train file doucement, parfois à quelques mètres de l'eau, parfois s'en éloignant pour franchir une des quelques 336 rivières se jetant dans le lac. Dans mes oreilles, c'est maintenant la prose de Jules Verne qui passe. Le tour du monde en 80 jours, en livre audio. Je varie les plaisirs.



Enfin, le train fait cap vers l'est. Je suis de nouveau tournée vers l'Orient, la direction que je suis depuis mon départ de France.

J'arriverai dans quelques heures à Oulan-Oudé, mon dernier arrêt avant Vladivostok.


Nous sommes le 24 décembre. Un jour comme les autres ici, puisque les traditions chrétiennes n'étant pas celles que l'on suit.

Aucune de mes demandes d'hébergement via CouchSurfing n'a aboutie, je me prépare donc à séjourner en auberge de jeunesse, pleine d'énergie pour parer tout éventuel resurgissement du mal du pays. L'auberge que j'avais repérée, tenue par un ami de Dimitry, a été contrainte récemment de fermer ses portes. Cela fait suite au vote d'une loi absurde interdisant les auberges de jeunesse de se tenir dans des immeubles. Je descends donc du train sans adresse où aller et je me sens assez forte pour apprécier pleinement toutes les surprises que me réserveront ces quelques jours ici !